Maxime, patient bipolaire, nous livre son témoignage
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Maxime, patient bipolaire, nous livre son témoignage

Publié le 12 juin 2018

POURQUOI CLAMER JE SUIS FIER D’ÊTRE BIPOLAIRE ? ON N’ENTEND RAREMENT LES GENS DIRE JE SUIS FIER D’AVOIR LE CANCER OU D’AVOIR UNE MALADIE CARDIAQUE !

Ce n’est pas de la provoc’. Je suis fier d’être bipolaire, car contrairement à beaucoup de personnes, je n’ai pas honte,  je ne veux pas me cacher, cette maladie fait désormais partie de moi, d’ailleurs peut-être a-t-elle toujours été là, tapie, attendant un signal pour se déclencher. 

QUAND AVEZ-VOUS  SENTI QUE DES CHOSES N’ALLAIENT PAS ?

J’ai eu beaucoup de chance. Une famille aimante à l’abri du besoin et une scolarité sans histoires. , Mais en troisième, ce cocon a explosé suite au divorce de mes parents. J’ai été littéralement fracassé par cette séparation qui est pourtant aujourd’hui un fait assez banal dans les familles françaises et parmi mes potes.

ET À PARTIR DE LÀ ? 

J’ai ouvert les vannes et je suis allé à fond dans tout. Les soirées alcoolisées, le cannabis… et une furieuse envie d’aller voir ailleurs, de découvrir d’autres continents. A 14 ans, je suis parti tout seul aux Etats-Unis en Summer camp, ça m’a en quelque sorte affranchi, je me suis dit que c’était bon, je n’avais pas peur de voyager seul. Du coup, l’année de mes 16 ans, je suis parti en solo pendant l’été travailler à Shanghai. La Chine me fascine depuis que je suis tout petit (ma mère travaille dans la mode et pendant plusieurs années, une partie de son activité s’est déroulée en Chine). Mes notes ont commencé à décliner, mes absences en cours à se multiplier, j’avais un total désintérêt pour ce qui se passait au lycée. Ma mère s’est démenée pour me trouver une école de commerce à Reims après mon bac. J’ai suivi pour lui faire plaisir et parce que dans le cycle, on pouvait partir en Chine…  Et j’ai continué à faire la fête à  Reims.

Je veux créer un mouvement pour que des milliers d’autres jeunes comme moi sortent du silence.

QUAND EST-CE QUE DE JEUNE ÉTUDIANT TRÈS FÊTARD ET HÉDONISTE VOUS COMPRENEZ QU’EN FAIT VOUS SOUFFREZ DE TROUBLES BIPOLAIRES ? 

Ce qui m’est arrivé aurait pu tourner au drame, heureusement des bonnes fées veillent sur moi. J’étais à Pékin dans le cadre de mes études en colocation avec de bons amis. Avant d’arriver en Chine, je suis parti en mission humanitaire dans un orphelinat en Inde, j’ai contracté une infection assez sévère, j’ai perdu 8 kg. Je suis arrivé en Chine pas très en forme et, par chance, j’ai été pris en charge par un médecin français qui m’a remis sur pied. Avant de commencer les cours, je débordais d’activités, je dormais 3 à 4 heures par nuit, je sortais tous les soirs, je rencontrais des gens incroyables, je buvais du whisky, je me droguais, je me bagarrais lors des soirées, je suis tombé fou amoureux et j’ai voulu très vite me marier, j’ai créé 4 sociétés … et j’ai surtout décidé d’arrêter l’école car j’avais 1001 projets à réaliser et les études ne pouvaient que les entraver. Mes colocataires avaient de plus en plus de mal à me suivre, ils ont alerté ma mère qui a contacté le médecin français qui m’avait soigné à mon arrivée. Il est rapidement venu me voir à mon appartement et il a tout de suite compris le degré d’urgence.  

EST-CE QUE VOUS VOUS RENDIEZ COMPTE DE CE QUI SE PASSAIT ?

Absolument pas, j’ai vu ma mère débarquer de France, elle m’a filé des calmants en les broyant dans ma nourriture pour que je ne me rende compte de rien.  Quand elle est arrivée, j’avais le visage en sang suite à une bagarre, la lèvre infectée, les dents éclatées, elle m’a fait croire qu’on devait s’occuper de soigner ma bouche et que ça ne pouvait se faire qu’en France. J’ai été rapatrié sans trop me rendre compte de ce qui se passait. J’ai eu un éclair de lucidité sur le tarmac en voyant ma tante qui est médecin et l’ambulance qui m’a amené directement au service d’urgences psychiatriques de Poissy.

COMMENT S’EST PASSÉE CETTE PREMIÈRE HOSPITALISATION EN SERVICE PSYCHIATRIQUE ? 

Mes premiers souvenirs sont une salle blanche, la camisole, l’isolement. Le diagnostic a été assez vite posé. Puis, j’ai été transféré dans une chambre à deux lits avec un voisin qui se disait possédé par le diable… Après j’ai commencé à pouvoir circuler et discuter avec plein de patients.  J’ai toujours aimé m’intéresser aux autres,  là j’étais servi car côté animation, il n’y avait pas grand-chose d‘autre à faire à l’hôpital. Ce qui m’a semblé le plus difficile, c’était la période d’ajustement pour trouver la bonne dose de  traitement et ce d’autant plus, que je devais aussi être sevré de mes différentes addictions…

ET DEPUIS TOUT ÇA…QUE DEVENEZ-VOUS ?  

Pendant l’année et demie qui a suivi, j’ai passé pas mal de temps, seul, à réfléchir à un rythme très très lent qui contrastait avec ma vie d’avant. Puis, je me suis petit à petit réveillé, car cette vie-là n’est pas faite pour moi, je veux avancer, je veux réaliser des projets. Je suis particulièrement à l’aise dans le montage d’événements, et après ce qui m’est arrivé, je veux créer des projets qui ont du sens, pourquoi pas un festival d’art pluridisciplinaire au profit des troubles bipolaires. 

COMMENT CELA SE CONCRÉTISE-T-IL ? 

Je réfléchis à un lieu destiné aux personnes  qui sentent qu’elles  ne vont pas bien, qui ont besoin d’être aidés ou conseillés, un lieu qui accueille après les périodes d’hospitalisation, une sorte de bulle pour s’autoriser à appuyer sur Pause, sans jugements…  J’ai créé une association « Bipolaire » avec pour slogan « bipolaires et fiers, et fières ». Elle est officiellement en activité depuis le 7 février 2018, avec un film dans lequel je raconte mon histoire diffusé sur les réseaux sociaux et sur mon site internet. J’ai envie de lancer un mouvement pour que des milliers d’autres jeunes comme moi sortent du silence, fassent des nouveaux projets, qu’ils n’aient plus honte d’être bipolaires, mais fier(e)s ! 

Site internet : www.bipolaire.fr

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