Les défis de la prise en charge des troubles bipolaires
Les soins des troubles bipolaires s’appuient sur l’adoption d’un mode de vie sain et régulier ainsi que la combinaison de différentes stratégies thérapeutiques, incluant les prescriptions médicamenteuses et les psychothérapies. Ils nécessitent également un suivi précis des pathologies somatiques (diabète, maladies cardio-vasculaires, etc.) et psychiatriques associées, ainsi qu’une attention particulière aux symptômes résiduels (dysrégulation émotionnelle, troubles du sommeil et du rythme circadien, difficultés cognitives).
La mise en place de ces stratégies thérapeutiques s’accompagne de nombreux défis à relever. Diagnostic « inacceptable », pas « entendu », qui nécessite de nombreux renoncements, le chemin vers la reconnaissance de sa maladie par le patient est douloureux et chaotique.
La rupture du suivi des traitements
Les troubles bipolaires peuvent conduire le patient au déni, à la colère, à l’angoisse et à des émotions susceptibles de devenir contreproductives et de conduire à une rupture du suivi des traitements médicamenteux, cette non-adhésion au traitement constituant une cause importante de rechute.
La difficile observance des traitements pharmacologiques (qui n’est pas propre aux troubles bipolaires) est par ailleurs renforcée par les effets secondaires indésirables des médicaments : perte de cheveux, prise de poids, perte de libido, tremblements. Nombreux sont les malades qui interrompent leur traitement sans oser l’avouer à leur médecin et chez lesquels on observe alors des rechutes.
La méconnaissance de la maladie
Les patients restent souvent très en difficulté pour détecter de manière précoce la survenue d’un nouvel épisode de la maladie et pour engager des stratégies d’action précoce visant à contrôler une décompensation.
L’adoption d’un mode de vie sain et régulier est également une gageure et nécessite au préalable une compréhension fine de la maladie.
L’incompréhension est une maladie opprtuniste qui aggrave le cours des troubles psychiatriques. F. Colom, E. Vieta. Manuel de la psychoéducation des troubles bipolaires
Les conduites à risque
Enfin, le développement de conduites à risque (toxicomanie, alcoolisme, etc.) peut être observé chez certains patients et constitue également un obstacle majeur au suivi des stratégies thérapeutiques proposées.
La psychoéducation: rendre les patients bipolaires acteurs de leurs soins
S’inscrivant dans la philosophie de l’éducation thérapeutique, la psychoéducation fait partie des recommandations internationales de prise en charge dans les troubles bipolaires. Elle offre une réponse aux défis thérapeutiques posés par les troubles bipolaires.
En effet, cette psychothérapie de groupe a pour ambition d’améliorer la connaissance d’un individu sur sa maladie, de l’aider à détecter les signes et symptômes annonciateurs de rechute et à jouer un rôle actif dans la réduction des risques à travers une meilleure gestion au quotidien des facteurs de stress, l’adoption d’un mode de vie plus équilibré et une meilleure adhérence au traitement médicamenteux.
Les groupes de psychoéducation reposent sur l’animation, par des thérapeutes, de différentes types de groupes:
- groupes de patients en phase euthymique (hors périodes de crise);
- groupes de proches;
- groupes mixtes.
Le Dr Bruno Etain explique que «l’efficacité de la psychoéducation tient avant tout à l’interactivité entre les participants. C’est la parole des patients qui va avoir un impact sur les autres, et pas seulement les informations délivrées par le thérapeute. Son ambition est d’aider les patients à prendre conscience des difficultés qu’ils rencontrent et à identifier les stratégies à même de leur redonner un peu de contrôle sur leur vie.»
Efficacité de la psychoéducation
Plusieurs études randomisées ont été menées, c’est-à-dire des études portant sur l’analyse comparative de deux groupes de patients sélectionnés au hasard et ayant suivi soit un programme de psychoéducation, soit une activité de groupe non structurée.
Toutes ces études prouvent que les améliorations sont importantes dans les groupes de psychoéducation : diminution du taux de rechutes dépressives et maniaques, diminution de la durée des hospitalisations et meilleure adhérence au traitement médicamenteux.
Malheureusement, bien qu’efficace et relativement peu coûteuse, cette thérapie est peu disponible en soins courants.
Pour répondre à ce problème, la Fondation FondaMental a conçu un programme de psychoéducation disponible dans les différents Centres Experts troubles bipolaires.