
Les innovations en psychiatrie : un tournant pour mieux soigner les maladies mentales
Une personne sur trois sera touchée par une maladie mentale ou un trouble du neuro développement au cours de sa vie. Dépressions, troubles bipolaires, schizophrénies ou autisme : ces pathologies, longtemps stigmatisées, sont aujourd’hui mieux comprises et traitées grâce aux avancées scientifiques. Les dix dernières années ont marqué un tournant historique, avec des innovations majeures qui redonnent espoir aux patients et à leurs proches.
Petit tour d’horizon des travaux de la Fondation Fondamental et de ses équipes.. ;
Les techniques d’imagerie cérébrale ont permis d’identifier les régions du cerveau impliquées dans les maladies psychiatriques. Grâce à cela, des thérapies par neurostimulation, comme la stimulation transcrânienne à courant direct (tDCS) ou la stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS), ciblent ces zones de manière précise. Ces méthodes sont particulièrement efficaces pour les dépressions résistantes aux antidépresseurs classiques ou les troubles obsessionnels compulsifs (TOC).
Par exemple, la rTMS a prouvé son efficacité dans le traitement des dépressions sévères, tandis que la tDCS montre des résultats prometteurs, bien que variables. Cependant, ces techniques ne sont pas encore remboursées par la Sécurité sociale, limitant leur accessibilité. En septembre 2025, le psychiatre et chercheur Charles Laïdi a reçu une bourse européenne pour son projet sur la neuromodulation via le cervelet, ouvrant de nouvelles pistes thérapeutiques.
La génétique promet des avancées vers une médecine personnalisée. Le projet France Génomique 2025 intègre désormais le séquençage complet du génome dans la prise en charge des maladies psychiatriques. L’objectif est d’identifier les causes génétiques sous-jacentes, prédire la réponse aux médicaments et développer des traitements sur mesure.
On pense que jusqu’à 20% des cas de maladies mentales pourraient être liés à des anomalies génétiques rares. Le séquençage génétique, désormais remboursé, permet une approche personnalisée et plus efficace. Boris Chaumette, psychiatre et chercheur à l’INSERM, souligne que cette avancée pourrait révolutionner le diagnostic et le traitement des troubles bipolaires, des schizophrénies ou des dépressions résistantes.
Le numérique, mis au service des patients offre de nouvelles perspectives. Les outils digitaux transforment la prise en charge des troubles psychiatriques. Le projet Passport BP, porté par la Fondation FondaMental, combine accompagnement humain et solutions numériques pour les patients bipolaires. On constate une division par deux des tentatives de suicide, et une réduction de 42% des hospitalisations. Ce qui entraine des économies significatives pour l’Assurance Maladie.
L’application EMMA, développée par le Pr Philippe Courtet, permet de détecter, en temps réel, les crises suicidaires grâce à un suivi quotidien de l’état émotionnel. En cas de risque, le patient reçoit des stratégies d’apaisement. Une alerte peut également être envoyée aux secours. Une version pour adolescents, BAE, sera lancée fin 2025.
Le lien qui peut être fait entre santé mentale et syndrome métabolique est de plus en plus connu. Les patients souffrant de troubles mentaux ont un risque accru de syndrome métabolique (obésité, diabète, hypertension), réduisant leur espérance de vie de 10 ans. Les bases de données de la Fondation FondaMental, ont permis de mesurer la prévalence des syndromes métaboliques dans les différentes maladies mentales (20% chez les personnes bipolaires, 24% chez les schizophrènes et 38% chez les dépressifs résistants), les analyses biologiques ont contribué à la compréhension des causes de cette augmentation de prévalence, et les équipes recommandent une évaluation systématique et une prise en charge adaptée du syndrome métabolique, combinant médicaments, psychothérapie et hygiène de vie.
L’immunopsychiatrie, s’appuyant sur les découvertes montrant les liens entre système immunitaire et cerveau a permis par exemple de montrer que 40% des patients atteints de maladies mentales présentent une inflammation chronique, souvent associée à un déclin cognitif et une résistance au traitement. Les équipes de la fondation FondaMental ont contribué à montrer le terrain immuno-génétique qui contribue au maintien de cette inflammation chronique et à l’identification de l’activation de différentes voies biologiques entrainant le déclenchement des psychoses auto-immunes pourraient concerner 15 à 20 % des patients psychotiques ou atteints de troubles bipolaires. Le projet Tim-Depist, coordonné par Marion Leboyer et Laurent Groc, teste des immunothérapies ciblées pour ces patients. L’objectif est d’améliorer le diagnostic et le traitement, en identifiant de nouveaux marqueurs biologiques.
D’autres voies biologiques ont été découvertes et sont en cours d’exploration sur le plan de la compréhension des mécanismes sous-jacents, des biomarqueurs diagnostics et de stratégies thérapeutiques ciblées. Par exemple, un essai thérapeutique d’une polymicrobiothérapie va être lancée (SWING) dans la dépression.
Vers une psychiatrie plus précise, plus humaine
Grâce à ces innovations (neurostimulation, génétique, numérique, immunopsychiatrie), la psychiatrie entre dans une nouvelle ère. Les patients bénéficient de diagnostics plus précis, de traitements personnalisés et d’un suivi continu. La recherche française, portée par des acteurs comme la Fondation FondaMental, joue un rôle clé dans cette révolution.
Ces avancées soulèvent aussi des questions sur l’accès aux soins, le remboursement des nouvelles technologies et la formation des professionnels. Une chose est avérée : la psychiatrie de demain sera plus efficace, plus humaine et plus accessible.