
Santé mentale : l’impact de la chaleur varie selon les troubles et avec les vacances
Baptiste Pignon, Psychiatre à l’hôpital Albert-Chenevier (AP-HP) à Créteil et membre de l’Alliance FondaMental
Avec le dérèglement climatique, les épisodes de chaleur extrême sont de plus en plus fréquents, ce qui suscite des inquiétudes quant à leurs répercussions sur la santé mentale. Les études sur le sujet présentent les défauts d’une forte hétérogénéité méthodologique, ainsi que de l’absence de prise en compte de certains facteurs contextuels clés, tels que les vacances scolaires.
Dans ce contexte, nous avons examiné le lien entre la température ambiante et les consultations aux urgences pour des troubles psychotiques et des troubles de l’humeur, en utilisant des indicateurs de température varié, ainsi que d’indicateurs prenant en compte la vitesse d’installation des vagues de chaleur. Les analyses proposées étaient réalisées avec ou sans ajustement sur les vacances scolaires. Nous avons analysé, sur une période de 11 ans, les données provenant d’un service d’urgence psychiatrique d’une banlieue parisienne. Les jours de chaleur élevée (supérieure au 90ème percentile) et extrême (99ème percentile) ont été comparés aux jours de température médiane à l’aide de quatre indicateurs : les températures moyennes diurnes et nocturnes, et deux indices de confort thermique qui tiennent compte notamment du taux d’humidité, du vent et de l’ensoleillement.
Les consultations pour troubles bipolaires ont diminué (-8,6 % à -19,7 %) pendant les périodes de chaleur élevée et extrême, tant à court (1 semaine) qu’à long terme (3 semaines). De leurs côtés, les consultations pour troubles dépressifs ont augmenté (+7,7 %) à long terme avec le taux d’humidité pendant les périodes de chaleur extrême. Quant aux consultations pour troubles psychotiques, elles ont augmenté à court terme (+14,1 % à +25,2 %) en fonction de tous les indicateurs - à l’exception de celui du taux d’humidité. L’ajustement de ces résultats pour tenir compte des vacances scolaires a inversé la tendance pour les troubles bipolaires et dépressifs et annulé celle pour les troubles psychotiques.
Ces résultats soulignent que les réactions psychiatriques à la chaleur varient selon le type de trouble, la durée d’exposition et l’indicateur thermique, et mettent en évidence l’importance de prendre en compte les facteurs contextuels.


