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Facteurs prédictifs de rechute dans la schizophrénie

Publié le 28 août 2019

La rechute psychotique (définie par au moins un épisode psychotique aigu d’au moins 7 jours, rapporté par le patient, ses proches ou le psychiatre traitant) est répandue au cours de la schizophrénie. Les répercussions peuvent être dévastatrices pour les patients, autant sur les symptômes, que sur les capacités cognitives (mémoire, apprentissage…), le fonctionnement et la qualité de vie. Pour les familles, ces rechutes provoquent non seulement un stress émotionnel intense, mais aussi des difficultés financières liées aux hospitalisations. 

Des précédentes études ont déjà démontré qu’un premier épisode psychotique survenant précocement, un tabagisme et une hospitalisation initiale plus courte sont associés à une rechute au cours des 3 années suivantes. 

Les Centres Experts FondaMental : une source riche d’informations

« Au sein des Centres Experts FondaMental schizophrénie, nous suivons des patients sur plusieurs années. Nous avons un certain recul dans le temps et recueillons un grand nombre de données auprès des patients reçus en consultation. Nous souhaitions mieux comprendre les facteurs prédictifs de rechute au sein de notre cohorte afin d’ajuster, à terme, nos recommandations de prise en charge et prolonger les périodes de stabilisation des symptômes aussi longtemps que possible », explique le Dr Guillaume Fond (Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille), premier auteur de l’étude.

« De même, nous déplorons un nombre non négligeable de «perdus de vue», c’est-à-dire de patients qui viennent pour un bilan en Centre Expert FondaMental mais que nous ne revoyons pas aux visites de suivi. Mieux comprendre les facteurs associés à une rupture du suivi dans nos centres est un enjeu important pour nous également ».

Les apports du machine learning

Pour mener cette étude, les techniques du machine learning ont été utilisées. Cette technologie permet l’analyse d’un grand nombre de données en mettant à jour des correspondances inédites entre ces dernières. Il s’agit d’une première dans l’analyse des données recueillies à l’occasion des consultations en Centres Experts Fondamental.

Ce sont initialement 549 personnes stabilisées atteintes de schizophrénie (malades depuis en moyenne 11 ans), qui ont été évaluées dans les 10 Centres Experts français (Bordeaux, Clermont-Ferrand, Colombes, Créteil, Grenoble, Lyon, Marseille, Montpellier, Strasbourg, Versailles), puis 315 patients (âge moyen = 32,6 ans, 24% de sexe féminin) qui ont été suivis à 2 ans pour déterminer les meilleurs prédicteurs de rechute psychotique d’une part et de rupture du suivi au sein des Centres Experts d’autre part.

Presque un patient sur deux rechute à deux ans

Conformément à d’autres études, dans cet échantillon de personnes suivies en ambulatoire (c’est-à-dire en dehors de toute hospitalisation), 42% sont « perdus de vue » au cours des deux années de suivi et, parmi les patients qui sont revus, 40% ont eu au moins une rechute.

L’agressivité est le meilleur symptôme prédictif de la rechute psychotique

Les chercheurs ont observé qu’un niveau colère élevé et/ou la présence de manifestations d’une agressivité physique, plus de 6 hospitalisations en psychiatrie au cours de la vie, un faible niveau d’instruction (inférieur à un niveau universitaire) et des délires et/ou des hallucinations fortement présents au départ sont les meilleurs prédicteurs de rechute psychotique à 2 ans avec un pourcentage de prédiction correcte de 63,8%.

En revanche, l’excitation, l’hostilité, une durée de la maladie de plus de 2 ans, les antécédents de traumatisme infantile, un QI plus bas et le manque d’observance du traitement sont les meilleurs prédicteurs d’un arrêt du suivi dans le réseau des Centres Experts FondaMental à 2 ans avec un pourcentage de prédiction correcte de 52,4%.

Prévenir les rechutes en agissant sur l’agressivité

« Cette première étude a permis de compléter nos connaissances en identifiant de façon plus précise les facteurs prédictifs de rechute et d’arrêt du suivi dans les Centres Experts. On pourrait toutefois en améliorer le niveau de prédiction à l’avenir en intégrant à ces analyses les données biologiques, génétiques, d’imagerie… », rappelle le Dr Guillaume Fond. 

Ces résultats soulignent l’importance d’évaluer le niveau d’agressivité chez les patients et de mettre en place des stratégies d’intervention personnalisées.

D’autres travaux ont montré que les antipsychotiques de seconde génération, plus spécifiquement la clozapine, diminueraient le niveau d’agressivité chez les personnes présentant une schizophrénie. « Dans notre échantillon, nous n’observons aucun effet protecteur de ces traitements sur la rechute psychotique. Des études complémentaires sont nécessaires », précise le Dr Guillaume Fond. 

L’enjeu pour la pratique clinique est de permettre aux médecins, mais aussi aux patients et à l’entourage de reconnaître les symptômes annonciateurs d’une éventuelle rechute, afin d’agir pour adapter le traitement ou mettre en place une évaluation rapprochée

Source : Machine learning for predicting psychotic relapse at 2 years in schizophrenia in the national FACE-SZ cohort. Prog in Neurospy & Biol Psy. Fond et al. 2019.

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