3 questions à Philippe d'Ornano
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3 questions à Philippe d'Ornano

Publié le 1 septembre 2025

Dès 2007, vous avez fait le choix de soutenir durablement la recherche en psychiatrie aux côtés de la Fondation FondaMental. Qu’est-ce qui vous a convaincu que ce champ, au-delà de son urgence sociale, portait aussi un fort potentiel d’innovation médicale et scientifique ? 

La Fondation Sisley s’est engagée dans le domaine de la psychiatrie depuis près de dix ans, un engagement né à la fois de ma connaissance du sujet, ayant eu des proches touchés, mais aussi d’une prise de conscience de l’ampleur de ces enjeux de santé. En France, on estime qu’une personne sur cinq sera concernée par un trouble psychique au cours de sa vie. C’est dire l’ampleur de l’enjeu, à la fois sanitaire, humain, social et économique. Soutenir cette cause nous semble indispensable pour mieux comprendre et mieux soigner ces pathologies. Et pour cela, il est nécessaire non seulement d’accompagner les avancées scientifiques, mais aussi de répondre à une souffrance humaine trop souvent invisibilisée et de contribuer à changer le regard sur ces maladies.  

L’engagement des entreprises en faveur de la psychiatrie peut participer à l’effort collectif pour transformer le paysage de la santé mentale.  Notre démarche s’est donc voulue la plus globale possible : elle associe information, lutte contre la stigmatisation, soutien à la recherche, et accompagnement de dispositifs innovants comme la pair-aidance. En tant que mécènes, nous identifions les structures qui nous paraissent produire des résultats concrets pour les patients, et nous les soutenons financièrement tout en leur donnant de la visibilité. 

Enfin, nous souhaitons faire émerger cette cause auprès de nos pairs — entreprises et fondations privées — pour favoriser la création de réseaux engagés autour de la santé mentale. 

Pouvez-vous nous parler d’un exemple concret de projet soutenu par la Fondation Sisley d’Ornano en partenariat avec la Fondation FondaMental, qui a eu un impact notable dans le domaine de la psychiatrie ? 

Il est difficile de ne citer qu’un seul projet, tant chacun d’eux nous paraît important et porteur d’impact. Nous avons soutenu plusieurs ouvrages, avec des approches plus ou moins vulgarisées, afin de mieux faire connaître les maladies mentales et de faire avancer la réflexion collective. Il est crucial de parler ouvertement des maladies mentales, comme nous avons su le faire pour d’autres pathologies comme le cancer ou le sida. Ce changement de regard est indispensable pour améliorer la prise en charge. 

Le soutien à la recherche revêt une importance cruciale, malgré les défis persistants liés à l’obtention de financements dans un contexte marqué par une incertitude croissante. Tous les projets n’aboutissent pas, mais chacun fait progresser la connaissance. Nous accompagnons surtout les projets qui sont susceptibles d’avoir un impact diagnostique et thérapeutique rapidement pour les patients. Par exemple, nous participons, en complément de financements publics, au projet TiM-DePist (CHU Bordeaux), qui cherche à identifier des patients porteurs d’auto-anticorps responsables de psychoses auto-immunes, en proposant une approche thérapeutique innovante par immunothérapie. Ce projet ouvre la voie à des diagnostics plus précoces et à des traitements plus ciblés — un enjeu majeur pour la psychiatrie de demain.  

Dans un domaine encore peu financé et marqué par la stigmatisation, pensez-vous que le mécénat privé peut jouer un rôle clé pour faire émerger des approches innovantes et changer le regard porté sur les troubles psychiatriques ?  

Absolument. L’histoire montre que les grandes avancées en santé sont souvent venues de la société civile. Pour le cancer, le sida ou plus récemment les maladies infectieuses, c’est la mobilisation des citoyens, des associations et des fondations qui a permis de briser les tabous, d’alerter l’opinion et de faire évoluer les politiques publiques. 

La santé mentale, aujourd’hui, est dans une situation paradoxale. Elle représente le premier poste de dépense de l’assurance maladie, et pourtant, l’engagement collectif reste très en deçà de ce que la situation exige. Cela tient à la nature même de ces pathologies, qui touchent à l’intime, à l’identité, et restent associées à des représentations négatives : l’enfermement, la dangerosité, l’irrationalité. Il est urgent de faire évoluer ces perceptions. Les maladies mentales sont des maladies comme les autres, qui se soignent et peuvent être stabilisées. Ce message d’espoir, porté par les professionnels de santé, doit devenir central dans le discours public. 

Les chiffres sont édifiants : en France, le coût direct et indirect des troubles psychiatriques est estimé à 163 milliards d’euros par an – soit le double du montant total de l’impôt sur le revenu. Dans ce contexte, que faire ? Les soignants, les associations, les patients font preuve d’un engagement admirable, mais avec des moyens trop limités. C’est là que le mécénat privé peut jouer un rôle utile, et amorcer un soutien plus large 

De nombreux projets de recherche, souvent de petite envergure mais porteurs d’impact, ne trouvent pas leur place dans les dispositifs de soutien public. Le mécénat d’entreprise peut offrir un appui ciblé, en complément de l’aide de l’État, pour faire émerger ces initiatives essentielles à la compréhension et au traitement des maladies psychiatriques. 

Le mécénat joue également un rôle clé dans l’innovation en psychiatrie. Des partenariats comme ceux entre la Fondation FondaMental et Sisley montrent qu’il est possible de faire progresser concrètement la psychiatrie. En soutenant des projets innovants, le mécénat favorise le développement de nouvelles approches, outils et traitements, et ouvre la voie à des avancées majeures dans les soins. 

Enfin, le mécénat permet de créer du lien, de faire se rencontrer chercheurs, médecins, entreprises, fondations, associations et citoyens. Ce travail collectif favorise une meilleure compréhension mutuelle et fait émerger des solutions concrètes. Il est aussi essentiel pour porter un message de déstigmatisation : Il faut dire, redire, montrer qu’il est possible d’aller mieux, de vivre de manière satisfaisante avec un trouble psychiatrique. Valoriser cet espoir et changer le regard de la société, c’est faire progresser durablement la cause de la santé mentale. 

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