
Questions / Réponses sur la Fondation FondaMental et les Centres Experts
Qu’est-ce que la Fondation FondaMental et quel est son objectif ?
La Fondation FondaMental est une fondation de coopération scientifique, qui a été créée par le ministère de la Recherche en réponse à l’appel d’offre des RTRS (Réseau Thématique et de Recherche) en 2006. Elle s’est fixé quatre missions : soutenir l’innovation dans l’organisation des soins, accélérer la recherche en psychiatrie, diffuser les savoirs, et briser les préjugés sur les maladies mentales.
Qu’est-ce que les Centres Experts FondaMental ?
Conçus et déployés par la Fondation FondaMental, les Centres Experts sont des plateformes de diagnostic et de recherche qui réalisent des bilans pour les patients présentant une dépression, une schizophrénie, un trouble bipolaire ou un trouble du spectre de l’autisme. Inspirés du modèle des centres experts pour maladies rares, ils reçoivent les patients, adressés par leur médecin (psychiatre ou médecin généraliste), et proposent une évaluation standardisée, systématique et exhaustive (psychiatrique, somatique, cognitive et biologique). Celle-ci est réalisée par des équipes multidisciplinaires intégrées au sein des services hospitaliers (hôpital de jour). A l’issue de ce bilan, une consultation de restitution est proposée aux patients et ses proches, et un compte rendu détaillé, avec les résultats du bilan réalisé et les recommandations thérapeutiques personnalisées, est adressé au médecin adresseur.
Comment les Centres Experts se positionnent-ils par rapport à la psychiatrie de secteur et à notre système de santé ?
L’ensemble des Centres Experts coordonnés par la Fondation FondaMental font partie de services de psychiatrie de secteur et/ou universitaires localisés sur l’ensemble du territoire. L’objectif de la Fondation FondaMental est d’intégrer ces centres de recours dans le parcours de soin, en complément de la psychiatrie de secteur, des services hospitaliers, des CMP (Centres Médico-Psychologiques) ou de l’offre libérale.
Les Centres Experts n’ont pas vocation à traiter les urgences psychiatriques, ni à accueillir des patients en crise aiguë — ce rôle appartient aux services d’urgences psychiatriques et aux structures de 1er et 2ème niveaux de soins.
Les Centres Experts interviennent en 3ᵉ niveau dit de recours, c’est-à-dire dans le cadre d’une approche spécialisée et complémentaire, lorsque la situation clinique d’un patient nécessite un bilan approfondi, une expertise diagnostique, ou une optimisation de la stratégie thérapeutique. Les patients y sont adressés par leur médecin. Ils présentent souvent des troubles graves et complexes (dépression résistante, troubles bipolaires sévères, schizophrénies, troubles du spectre autistique) souvent difficiles à stabiliser. Beaucoup ont une histoire marquée par des années d’errance diagnostique ou de traitements inefficaces.
Quel est l’intérêt des Centres Experts spécialisés par diagnostic ? Qu’est-ce que cela permet pour les patients ?
Depuis 10 ans, ces Centres ont apporté la preuve de leur efficacité. Selon une étude publiée en 2017, nous avons montré que, 12 mois après un 1er bilan effectué en Centre Expert Bipolaire, le pronostic des patients s’améliore nettement, comme en attestent une baisse de moitié des ré-hospitalisations, une amélioration de l’observance des traitements, une diminution de l’intensité des symptômes, et un dépistage des comorbidités médicales non-psychiatriques. Ces données sont en cours de réplication et de comparaison avec les données de la sécurité sociale qui permettent de comparer les patients suivis avec ou sans bilan en Centre Expert dans le cadre d’un projet PREPS. Ce travail d’interrogation et d’amélioration de l’efficacité des soins dans les centres experts est un objectif porté par les membres des centres experts et de la Fondation FondaMental.
Quels résultats concrets montrent le dynamisme de la recherche menée par les Centres Experts ?
La Fondation FondaMental et ses Centres Experts ont contribué à plusieurs découvertes majeures :
- Les progrès de la génomique ont permis d’améliorer l’identification du terraingénétique qui favorise l’apparition des troubles bipolaires, de l’autisme ou de la schizophrénie. Cela nous permet de mieux comprendre les mécanismes étiologiques qui sous-tendent ces maladies, comme les mutations des gènes impliqués dans la mise en place de l’appareil synaptique dans les troubles du spectre de l’autisme, l’association à des variants fonctionnels de l’immunité innée et adaptative, l’association à des haplotypes du système du complément qui sous-tendent l’élagage synaptique, etc…
- Les techniques d’imagerie cérébrale nous ont conduits à mieux identifier les régions cérébrales impliquées dans les maladies psychiatriques ; ce qui permettra de guider certaines thérapies en fonction de chaque patient, comme c’est déjà le cas pour la r-TMS (stimulation magnétique transcrânienne). Grâce à un ciblage de zones précises du cerveau, cette technique permet de soigner les dépressions résistantes.
- L’établissement de liens entre dysfonctionnement immunitaire et maladies mentales ont permis de montrer que 40 % des maladies psychiatriques sont associées à une inflammation chronique à bas bruit. Identifier des patients porteurs de cette inflammation nous permettra de tester l’efficacité de stratégies thérapeutiques anti-inflammatoires.
- Les études épidémiologiques ont montré que le syndrome métabolique (obésité, hypertension artérielle, dyslipidémie et/ou hyperglycémie) touche plus de 20% des individus ayant un trouble bipolaire, contre 10 % en population générale en France. Or, ce syndrome entraine un risque accru de développer des maladies cardiovasculaires, qui sont l’une des principales causes de mortalité chez les patients souffrant d’un trouble bipolaire. Il est donc essentiel de proposer un dépistage systématique du syndrome métabolique chez ces patients et de proposer une prise en charge globale.
Signe du dynamisme de cette recherche en psychiatrie au sein des Centres Experts, plus de 200 publications scientifiques internationales issues de l’animation de ces réseaux, qui comptent parmi les plus grandes cohortes dans le monde, ont été produites en l’espace de 10 ans.
Quelles sont les références des publications scientifiques évaluant l’impact des bilans diagnostiques faits sur les centres experts coordonnées par la Fondation FondaMental ?
L’article d’Henry et al (2017), portant sur des patients bipolaires reçus en Centres Experts, montre :
- Une amélioration des symptômes résiduels
- Une amélioration du fonctionnement global
- Une amélioration des troubles du sommeil
- Une diminution des comorbidités psychiatriques (troubles anxieux, addictions, etc.)
- Une meilleure adéquation des traitements avec les recommandations internationales pour le trouble bipolaire
- Une réduction de 50% des ré-hospitalisations des patients bipolaires 12 mois après un premier bilan en Centres Experts.
D’autres publications scientifiques ont apporté la preuve de l’efficacité des Centres Experts :
- Une amélioration de l’observance aux traitements sur un suivi de 2 ans et différentes trajectoires d’adhérence au traitement. Ces données ont été publiées dans un journal international à comité de lecture « Journal of Affective Disorders » en 2021 :
- Trajectories of medication adherence in patients with Bipolar Disorder along 2 years-follow-up. Consolini JL, M’Baila K, Perchec C et al. Journal of affective disorders Volume 282, 1 March 2021, Pages 812-819
- L’importance des comorbidités somatiques dans les troubles bipolaires, la schizophrénie et la dépression résistante, pathologies évaluées au sein des centres experts :
- Non-alcoholic fatty liver disease in a sample of individuals with bipolar disorders: results from the FACE-BD cohort. Godin O, Leboyer M, Belzeaux R et al. Acta Psychiatr Scand. 2021 Jan;143(1):82-91.
- Metabolic syndrome in a French cohort of patients with bipolar disorder: Results from the FACE-BD cohort. Godin et al., J Clin Psychiatry. 2014 ;75(10):1078-1085
- Metabolic syndrome, abdominal obesity and hyperuricemia in schizophrenia: Results from the FACE-SZ cohort. Godin O, Leboyer M et al. Schizophr Res. 2015 Oct;168(1-2):388-94.
- Prevalence of Metabolic Syndrome and Associated Factors in a Cohort of Individuals With Treatment-Resistant Depression: Results From the FACE-DR Study. Godin O, Bennabi D, Yrondi A.J Clin Psychiatry. 2019 Oct 15;80(6):19m12755.
A la suite de ces résultats scientifiques sur l’importance du syndrome métabolique – une 1ère en France et repris à l’international -, des applications pratiques ont été proposées aux patients, comme des groupes de psychoéducation sur le syndrome métabolique.
- La synthèse de l’ensemble des données publiées à partir des données des centres experts bipolaires et montrant leur impact favorable a été publiée dans le Journal of Affective Disorder en 2022 :
LEBOYER M, et al Key findings on bipolar disorders from the longitudinal FondaMental Advanced Center of Expertise-Bipolar Disorder (FACE-BD) cohort Journal of Aff Disorder, March 2022, 307,140-156 PMID: 35339569
L’article de Dubreucq et al (2019) montre, sur un petit nombre de patients (N=183), qu’après un passage en Centre expert Schizophrénie, l’accès aux thérapies psychosociales est beaucoup plus important, passant de 4% à 35%, et que ceux qui ont eu accès aux thérapies voient leur pronostic s’améliorer.
Un autre article publié en 2019 apporte également des résultats encourageants concernant les patients suivis dans les Centres Experts Schizophrénie. Si l’article est centré sur le concept de «staging», qui consiste à classer les patients selon la gravité et le stade d’évolution de leur maladie, il comporte également une analyse exploratoire intéressante. Celle-ci montre que les patients les plus sévèrement atteints (stades modéré à sévère) s’améliorent un an après un passage en Centre Expert, comme en témoignent une réduction de la sévérité clinique, une amélioration de la qualité de vie et du fonctionnement, une réduction des symptômes dépressifs associés et une meilleure adhésion au traitement. En revanche, les patients au stade le moins sévère restent globalement stables. Même s’il s’agit d’analyses exploratoires, ces résultats renforcent l’idée que les bilans réalisés dans les Centres Experts peuvent avoir un effet bénéfique sur l’évolution de la maladie.
Les résultats sur les performances des Centres Experts sont donc multiples et à disposition. Vous en trouverez davantage ici : Les publications scientifiques | La Recherche & Les projets | Fondation FondaMental
Comment expliquer une telle réussite ?
C’est un modèle innovant pour la prise en charge des patients souffrant de maladies mentales, qui permet une fois par an de réaliser un bilan complet, de proposer des recommandations thérapeutiques personnalisées, et d’offrir l’accès aux dernières avancées de la recherche.
Les Centres Experts sont regroupés en réseau par pathologie, à l’échelle nationale, pour faciliter la collaboration entre équipes, alimenter une base de données anonymisées permettant aux médecins et aux chercheurs d’exploiter des données observationnelles et longitudinales, afin de mieux connaitre et comprendre les maladies mentales, d’identifier des sous-groupes de patients et proposer les traitements qui leur sont les plus adaptés.
Loin de s’opposer aux objectifs thérapeutiques, ces objectifs de recherche les complètent. Les Centres Experts établissent ainsi un cercle vertueux qui permet de progresser vers une psychiatrie de précision et un accompagnement sur-mesure.
Peut-on attendre des Centres Experts un accès facilité à l’innovation thérapeutique ?
Les Centres Experts peuvent, lorsque cela est pertinent pour le patient, l’orienter vers des structures proposant des thérapies innovantes. Les équipes des Centres Experts peuvent également proposer aux patients de participer à des études menées par la Fondation FondaMental, lorsque cela est justifié et avec leur accord. C’est le cas par exemple du projet TiM-DePist, qui vise à identifier des patients porteurs d’auto-anticorps qui ciblent les récepteurs de certains neurotransmetteurs, pour leur proposer de participer à un essai thérapeutique associant une immunothérapie à leur traitement habituel.
Pourquoi pérenniser les Centres Experts ?
Les maladies mentales sont un grand enjeu de santé publique de par la fréquence de ces maladies et de l’impact dont elles sont responsables. Pourtant, les délais d’attente avant d’avoir un rendez-vous pour un bilan diagnostique en centre expert sont aujourd’hui encore trop longs (1 an en moyenne) et constituent une véritable perte de chances pour les patients. C’est pourquoi la Fondation FondaMental et un collectif de patients et de personnels hospitaliers demandent la pérennisation de ces Centres et leur généralisation sur les territoires.
- Alors qu’une personne sur trois sera exposée, au cours de sa vie, à la maladie mentale, il est plus que jamais nécessaire de pérenniser le dispositif Centres Experts. Leur rôle est essentiel pour garantir une prise en charge spécialisée, au bénéfice des 13 millions de Français concernés et des 9 millions d’aidants qui les soutiennent. Assurer leur maintien, c’est répondre à un enjeu majeur de santé publique.
- D’après une étude de McKinsey publiée en avril 2025, chaque dollar investi en santé mentale pourrait générer un retour sur investissement de 5 à 6 dollars. Les troubles mentaux ne bénéficient que de 2 % des dépenses publiques nationales de santé dans le monde, ce qui se traduit par un déficit de financement annuel de 200 à 350 milliards de dollars.
Comment sont financés les Centres Experts ?
À ce jour, le financement des Centres Experts FondaMental est exclusivement public, principalement via :
- La DGOS (Direction Générale de l’Offre de Soins), avec des financements versés directement aux hôpitaux hébergeant les Centres Experts.
- Les ARS (Agences Régionales de Santé), via des crédits FIR (Fonds d’Intervention Régional).
- Les hôpitaux, qui apportent leurs moyens propres
Comment voyez-vous le rôle de vos divers mécènes dans votre activité ? Comment garantir une indépendance de votre recherche vis-à-vis d’eux ?
La Fondation FondaMental est une fondation de coopération scientifique fondée par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche en 2007, en même temps que d’autres instituts de recherche comme l’Institut du Cerveau (ICM) ou l’Institut Imagine.
Il s’agit d’un statut apparu en 2007, à l’initiative des pouvoirs publics, afin de permettre la création, par décret simple et non par décret en Conseil d’Etat, de fondations ayant vocation à intervenir sur des grands programmes de recherche thématiques et à permettre leur financement par des sources privées dont les dons, legs et produits du mécénat. La fondation FondaMental a ainsi été créée pour soutenir la recherche et l’innovation en psychiatrie.
Bien que créée par des fondateurs de droit public, il s’agit bien d’une fondation de droit privé et non d’un établissement public. A ce titre, elle est habilitée à recevoir aussi bien des fonds privés que publics. Cette alliance des forces publiques et privées, qu’il s’agisse de grands ou de petits donateurs, permet de faire avancer la recherche et l’innovation en psychiatrie au bénéfice des patients.
La Fondation est un réseau de services hospitaliers et d’équipes de recherche qui travaillent ensemble depuis maintenant plus de 15 ans. Nous réunissons plus de 500 chercheurs associés, dont un grand nombre sont reconnus internationalement. Tous nos travaux sont évalués par nos pairs à l’échelon national et international, sans aucune influence extérieure, conformément aux règles d’éthique et de déontologie, et nous en faisons bénéficier directement les patients à travers les Centres Experts.
Est-il clair pour les patients que les bilans réalisés en centres experts servent aussi pour la recherche, et comment en sont-ils informés ?
La Fondation informe systématiquement les patients reçus en Centre Expert sur l’utilisation de leurs données personnelles anonymisées, collectées lors des consultations. Chaque patient reçoit, en amont de sa visite, une lettre d’information individuelle. Lors de l’entretien, il est informé par le médecin de ses droits d’accès, de rectification, d’effacement et d’opposition au traitement des données, conformément à la loi CNIL et à la législation sur la protection des données personnelles (RGPD).
Sauf opposition de la part du patient ou de son tuteur légal, toutes les données sont enregistrées de manière anonymisée dans une base de données nationale regroupant les données de tous les Centres Experts français. La confidentialité et l’anonymat des données sont strictement respectés, avec des mesures de chiffrement comme un code d’identification remplaçant les noms et prénoms des patients. Ces données peuvent être utilisées à des fins de recherche scientifique nationale ou internationale, en collaboration avec des partenaires académiques ou industriels, dans le cadre de la cohorte FACE (FondaMental Advanced Center of Expertise). Ce process et la finalité de traitement ont reçu un avis favorable du Comité Consultatif sur le Traitement de l’Information en matière de Recherche dans le domaine de la Santé (CCTIRS) et ont été autorisés par la CNIL.
Concernant les données biologiques collectées dans le cadre de recherches impliquant la personne humaine (RIPH), les patients doivent remplir et signer un formulaire de consentement, conformément aux dispositions du code de la santé publique. Cette bio-collection a fait l’objet d’une déclaration auprès du ministère de la Recherche, de l’ANSM et de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), et a reçu l’avis favorable des Comités de Protection des Personnes (CPP) de la Pitié Salpêtrière et de l’hôpital Saint-Antoine.
La participation à ces projets de recherche est libre et ne donne lieu à aucune indemnité. En application de la loi CNIL et conformément à la législation RGPD, le patient a le droit de refuser d’y participer ou de retirer, limiter ou rectifier son consentement à tout moment, sans avoir à en expliquer les raisons et sans que sa décision n’ait de conséquence sur sa prise en charge médicale.
Que répondez-vous aux accusations de lobbying qui vous sont adressées ?
La Fondation FondaMental est une fondation d’utilité publique et est dotée d’un commissaire du gouvernement qui s’assure du respect de l’intérêt général. Elle se mobilise pour lutter contre la stigmatisation des troubles psychiatriques et des personnes qui en sont atteintes, pour combattre le fatalisme et le renoncement. Elle œuvre également à renforcer la connaissance et la compréhension de ces enjeux, tant auprès du grand public que des pouvoirs publics, et milite pour promouvoir l’adoption d’une politique publique volontariste en matière de santé mentale.
Pour atteindre ces objectifs, la Fondation :
- Mène des campagnes de sensibilisation et organise des événements pour informer le grand public et lutter contre la stigmatisation des maladies mentales
- Répond aux invitations et demandes des journalistes et des décideurs, pour partager ses données et résultats de recherche scientifique afin de contribuer à un débat public éclairé
- Œuvre au transfert des connaissances auprès des chercheurs, professionnels de santé et associations, à travers des conférences, des congrès scientifiques et des journées dédiées aux patients.